Pour ce Don Juan, le réalisateur propose une interprétation très intimiste, voire presque minimaliste. Ici pas de grandiloquence, pas de...
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Anne Cazaubon : Le pot aux roses
Mon arrivée les élevait dans l’arbre généalogique et cela me donnait visiblement un privilège : un titre d’“aînée des petits-enfants” et le droit d’avoir un arbre à mon nom, rebaptisé le rosier Nanou.
À chacun de mes anniversaires, on me contait dans une lettre la floraison dudit rosier. Sa gelée tardive ou son éclosion fulgurante. En été, quelques-unes de ses fleurs venaient agrémenter sous la forme d’un bouquet la table en fer blanc piquée et ses assiettes basques ébréchées.
Quand mon grand-père s’est éteint l’été dernier, j’ai passé un long moment seule dans son jardin et j’ai eu envie de me rapprocher de mon arbre. C’est alors que j’ai réalisé quelque chose que je n’avais jamais vu plus jeune. À la racine du rosier, mes grands-parents avaient également planté une arche de jardin : un arceau métallique en guise de tuteur.
Avec mes yeux d’adultes, je constatai que l’arche rouillée était totalement nue. J’en conclus d’abord que le rosier devait être mort, juste avant d’apercevoir un peu plus loin une grosse tige, droite comme un i. Tel un bambou qui s’élançait depuis le sol, ce tronc fin mais solide remontait le long d’un gigantesque cèdre du Liban. Je suivis des yeux cette tige infinie pour la laisser m’emmener jusqu’à la cime de l’arbre. Elle avait poussé dans l’ombre, avant de percer au jour, au travers des branches les plus hautes, coiffant ainsi le cèdre d’une magnifique couronne de roses inattendue !
« En silence j’admirai l’itinéraire bis
qu’avait choisi la nature. »
J’ignorais que cela était possible. Qu’un rosier puisse grimper si haut. La grappe de roses trônait bien au-dessus de la maison. En silence, j’admirai l’itinéraire bis qu’avait choisi la nature, les chemins de traverse qu’elle avait pris pour ne pas rester dans les clous, et je méditai un instant sur les leçons de ce rosier audacieux. Il était venu m’enseigner comment être là où on ne m’attend pas pour grimper plus haut et comment traverser mes zones d’ombre pour aller vers ma propre lumière. //